l'auteur réfléchit à son roman de SF en cours d'écriture. Il est concentré sur son travail.

Mon processus d’écriture repose sur une démarche en trois temps. Je vous présente dans ce billet la première étape.

C’est l’écriture brute, là où s’exprime la créativité du projet. Je visualise la scène et les dialogues des personnages. J’adopte la posture d’un spectateur et, en tant que « scribe », je transpose en texte le déroulement de ce qui se joue dans mon esprit. Dit autrement, c’est une approche instinctive : il me suffit de me concentrer sur le sujet en cours et j’écris. Au préalable, je relis toujours le paragraphe précédemment rédigé, puis je laisse mon imaginaire se déployer en arrière-plan. C’est une promenade au gré de l’histoire et des événements, dans la continuité du récit.

Jusqu’à présent, je n’ai jamais connu la fameuse panne de la page blanche. Mon imagination ne me fait jamais défaut. Cela peut sembler paradoxal, car l’immersion dans l’histoire n’est pas de tout repos. Ce n’est pas comme aller au cinéma et se laisser porter par un film : il existe une implication personnelle intense. Même si je conserve une posture de spectateur, je fais partie intégrante de l’histoire. Imaginez assister à un western où deux hommes se font face pour un duel : vous ressentez la chaleur pesante d’une rue poussiéreuse, le silence qui précède l’instant fatal où les adversaires dégainent en même temps leur revolver. Être dans la scène, et non seulement regarder comme dans le film « Règlement de comptes à OK Corral », est une expérience singulière.

Ce procédé rejoint d’ailleurs un thème récurrent de la science-fiction que l’on retrouve dans plusieurs films et séries, tels que « Westworld » ou « Total Recall ». J’ai cette faculté à la fois de participer et de décrire mes histoires. Mais l’exercice est exigeant : selon la nature des scènes vécues et transcrites, on y laisse de l’énergie, comme après un rêve intense ou un cauchemar. Certaines séquences peuvent se révéler épuisantes.

Je suis conscient de ne rien inventer dans ce processus créatif. Je me souviens, par exemple, que Moebius, maître de la bande dessinée de science-fiction, avait conçu son album « Le Garage hermétique » de manière comparable. Cette œuvre, née en 1976 dans la revue Métal Hurlant, fut publiée sous forme de feuilleton en épisodes très courts (2 à 4 pages), sans scénario préétabli. Moebius s’était lancé un défi : improviser chaque épisode au fil de l’inspiration, sans plan global ni idée préalable, parfois même sans savoir comment l’histoire allait se poursuivre.

C’est exactement ainsi que j’écris. Je n’ai pas consciemment choisi cette méthode, mais j’ai constaté que je m’appropriais cette recette singulière. Lorsque j’avance dans un chapitre, il m’arrive souvent de n’avoir aucune idée de la façon dont l’histoire va évoluer. Bien sûr, la cohérence globale du projet reste indispensable et je dois régulièrement réintroduire ou adapter de nouveaux éléments pour assurer l’unité du récit.

À titre d’exemple, le premier roman que je m’apprête à publier a été finalisé à cette étape d’écriture et compte environ 400 pages à ce jour. Pourtant, le thème central du roman n’était pas celui de l’histoire initiale, laquelle entretenait d’ailleurs un lien assez lointain avec la science-fiction. L’idée m’est venue sous la forme d’un simple paragraphe, qui s’est transformé en chapitre puis, au fil de son développement, a pris ses distances avec le projet d’origine. De nouveaux chapitres sont venus s’y greffer jusqu’à former un arc narratif lié au contexte général mais suffisamment autonome pour vivre indépendamment.

Arrivé à près de 1 000 pages d’écriture du projet global, il m’a fallu trancher : je ne pouvais pas poursuivre indéfiniment sans passer aux étapes suivantes nécessaires pour aboutir à un roman de taille raisonnable. Je devais pouvoir me dire que j’avais terminé, au moins, une partie de l’histoire. Ce bloc de chapitres est donc devenu un arc narratif indépendant. Autonome en termes d’intrigue, il peut désormais passer aux phases suivantes de mon processus d’écriture. J’ai d’ailleurs prévu de le scinder en deux volumes que je compte publier.

Je vous présenterai les deux étapes suivantes de mon processus d’écriture dans mes prochains articles.

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